Nadu Marsaudon, graphiste, dessinateur et peintre en Charente-Maritime (et partout dans le monde)

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Margaret, 1975

Il est possible que vous connaissiez Nadu Marsaudon, mais vous ne le savez pas encore. Vous souvenez-vous cette soirée au Rancho, fameux club de Charente-Maritime à Saint-Palais-sur-Mer ? Et l’après-midi parmi les singes et les éléphants du Zoo de la Palmyre ? Ou la sole meunière au mythique « Tiki », dont on se souvient encore du slogan (« Taka Alé O Tiki »). Et bien il y a la « patte » Nadu Marsaudon – dans les décors, fresques, logo, affiches, etc.

J’ai eu envie de vous en parler, non seulement parce que c’est un ami de longue date de mes parents, et qu’il m’est toujours apparu comme un personnage avec une certaine aura inspirante, mais aussi parce que j’ai eu la chance de me balader dans son atelier le printemps dernier – sans oublier la visite de sa présente exposition au musée de Royan.

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Nadu et sa femme France vivent dans une petite maison haut perchée sur une falaise qui surplombe l’estuaire de la Gironde, un écrin de mer et de ciel mêlés, où l’on resterait scotché à la baie vitrée si on était dans la maison de n’importe qui. Le voyage commence par des collections de centaines de petits objets qui peuplent la maison : des autels vaudous, des panneaux indiens finement sculptés, des casques tibétains, des cornes de bisons, des statuettes de vierges ou de pin-up des années 50, des petites sculptures balnéaires des années 1940 qu’on lui piquerait bien, etc., le tout trouvé dans un bazar au Yemen, dans les contreforts de l’Himalaya ou encore à la brocante de Royan. On trouve aussi exposée en ce moment à Royan une partie de sa collection d’objets amérindiens, digne d’un musée.

Parce qu’il a voyagé, Nadu. En Haïti, Afrique, Amérique, etc. et plus de dix fois en Inde. Il nait de ces voyages, depuis toujours, des carnets de dessins aux traits d’une délicatesse et d’une précision envoûtante. Animé par les mythologies des quatre coins du globe, et des arcanes de sa propre imagination, Nadu dessine et peint des êtres hybrides et énigmatiques, souvent adjoints d’une écriture divinatoire calligraphiée avec une égale adresse. Dali et le surréalisme ne sont pas très loins : Nadu a d’ailleurs rencontré le gourou moustachu dans sa folle maison de Cadaques.

Quand on pénètre dans son atelier – dans lequel on ne doute pas qu’il conserve les esprits rencontrés lors de ses voyages – on découvre les oeuvres d’une vie, qu’il déploie sous vos yeux comme s’il en avait eu plusieurs. L’influence du surréalisme est là, mais on sent aussi les années 70, le trait acéré et ondulant, les couleurs vives, quasi psychédéliques.

Une figure remuante de la région, qui, au-delà de son atelier, a distillé son style toujours teinté d’humour sur le front de mer charentais.

Vous ne regarderez plus les fresques du Rancho de la même façon. Bonne visite.

PS : ce post n’est pas subventionné par le Département de la Charente-Maritime…

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Nadu et ses collections de boules de neige, d’affiches de corrida…

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Odalisque à la Marsaudon

Déesse et autel vaudou

Déesse et autel vaudou

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Homme au Narguilé
Huile sur papier
Pushkar – Inde
1981

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Ladakh

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Le pa-chat

Pour en savoir plus sur son travail : http://nadu-marsaudon.com

Par Pauline Daniez

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Galerie Daniez et de Charette / Lignes en séries

C’est dans un ancien atelier de confection reconverti en espace de coworking pour jeunes graphistes dans le vent que la galerie Daniez et de Charrette s’est installée pour quelques semaines. Dans cet espace lumineux et accueillant, on se sent presque comme à la maison, et les œuvres s’y découvrent et s’y révèlent avec familiarité. Second volet d’un diptyque se partageant entre Paris et Bratislava, l’exposition Lignes en séries poursuit son exploration de la notion de sérialité dans des œuvres graphiques et sculptées, interrogeant également le rapport de ces deux médiums à la ligne.

Sculpture de lignes, le Cœur de Caroline Corbasson oscille au-dessus des têtes. Sa forme, qui rappelle celle des croquis dont les jeunes filles ornent les marges de leurs cahiers, se redessine perpétuellement dans son balancement.  À cette structure aérienne, toute faite d’acier, répondent les délicates et organiques suspensions de Samuel Yal. Tranches de tête à proprement parler – n’ayons pas peur des mots –, elles recomposent dans les airs les graphiques arabesques des circonvolutions du cerveau.

Sur un grand mur blanc se déploient les Écorchés de Mathilde Roussel. Des peaux de papier dont la texture, souple et rigide à la fois, donne irrésistiblement envie de les toucher, même si l’on se dit que le moindre geste et la moindre caresse pourraient leur être fatal. Trophées de chasse durement – longuement – obtenus, ils sont pareils aux précieuses reliques d’un déshabillage complet. Mais nul ne sait qui y a réellement laissé sa peau.

À côté, le travail de Mathieu Bonardet s’expose tel un processus. How much is one million steps? est constitué d’une photographie, d’un protocole et de plusieurs panneaux parcourus de traits tirés à main levée. Ces derniers forment une frise – l’artiste fait courir son crayon tenu bras tendu le long de son corps alors qu’il passe et repasse devant son support –, scandée rythmiquement par sa présentation morcelée. L’œil du spectateur, en suivant cette ligne fragmentée, rejoue en mode mineur la promenade frénétique de Mathieu Bonardet.

Avant de sortir, un coup d’œil jeté dans une salle adjacente vous arrête. Ou plus exactement, c’est une cinquantaine d’yeux qui vous observent et attirent votre regard. Collection de cocards dans un sens propre très figuré, Inimité de Benoît Blanchard vous renvoie à vos rancoeurs quotidiennes et autres amertumes ravalées. À tous ces coups désirés mais jamais portés. L’espace d’un instant, le sentiment se fige, le souvenir renaît et se fond dans la somme de ces sensations vécues et partagées.

Elodie Voillot.

Nota : Parce qu’une histoire est entre de naître entre la galerie Daniez et de Charrette et le Laptop, l’exposition devait se finir aujourd’hui va être prolongée. Plus de détails bientôt concernant les modalités de visite.

Exposition Lignes en séries, galerie Daniez et de Charette au Laptop.

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Art of the Day / Michel Blazy – Le Grand Restaurant

Pour ses 10 ans, le Plateau (Frac Ile-de-France) a mis les petits plats dans les grands et nous convie à une grande bouffe. Aux fourneaux, Michel Blazy, qui pour l’occasion nous à concocter un repas de fête. Au menu, des escargots faisant la course sur une immense surface ocre-rouge laissant derrière eux des traînées brillantes, longues arabesques baveuses dessinant les motifs d’un tapis en perpétuelle recomposition, des cartographies désertiques en crème dessert séchée et grattée, une aire de jeux géante pour fourmis (presque) apprivoisées,…

Moment digestif, il est possible pour tout un chacun de participer à la création des fameuses sculptures en peaux d’orange de l’artiste en s’armant du presse-agrume et en se préparant un petit jus bien frais.

Le visiteur désaltéré et rechargé en vitamine C peut reprendre son périple culinaire, qui s’achève en triomphe par une immense meringue, gigantesque omelette norvégienne en coton, dont les replis ont été plantés de lentilles germées. Les graines vont croître et recouvrir la structure pour en faire un tumulus herbeux.

C’est le ventre léger et pourtant parfaitement repu que l’on quitte ce « Grand Restaurant » – enfin, c’est plutôt en voraces affamés que nous nous sommes rués sur une montagne de raviolis frits après notre visite (les nourritures artistiques ne sauraient suffire). 

Elodie Voillot.

Exposition Michel Blazy au Plateau du 20 septembre au 18 novembre http://www.fracidf-leplateau.com/fr/index.html

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Art of the say / la forme informe – un nuage de Gerhard Richter

Un jour, Gerhard Richter a décidé de peindre la photo d’un nuage – pas très gros, dense en son coeur et finement vaporeux sur les bords. Un poisson peut-être? Non, décidément, ce nuage n’est que lui-même, une masse hasardeuse et indéfinissable. Comme le dit Hubert Damish dans sa Théorie du nuage, le nuage  » contredit […] par son inconsistance relative, à la solidité, à la permanence, à l’identité qui définissent la forme ».

Peinture figurative sans forme et sans autre sujet que l’inatteignable et l’impermanent, elle n’est cependant pas romantique comme le ciel chez Friedrich, et se situe plutôt dans la simplicité d’une mutation des médiums, de la vision photographique en contre-plongée à l’expérience picturale frontale et massive. Entre figuration et abstraction, Richter nous promène encore une fois dans l’évidence de la complexité et de l’entre-deux, comme le nuage entre la terre et le bleu du ciel – inutile d’ajouter que c’est follement beau.

Exposition Gerhard Richter au Centre Pompidou jusqu’au 24 septembre : précipitez-vous si ce n’est déjà fait, c’est sans conteste le plus grand peintre de la seconde moitié du XXème siècle, oui oui…

Pauline Daniez

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Pipilotti Rist : Expecting / Centraalmuseum Utrecht

Le Centraalmuseum d’Utrecht est un de ces musées de province installé dans de vieux bâtiments habilement reconvertis pour l’occasion, mais qui portent encore les traces de leur vie d’avant. Ainsi, au deuxième étage d’un bâtiment labyrinthique, après avoir traversé deux rideaux colorés qui en ferment l’entrée – tentures chamarrées marquant le passage dans un autre monde –, on pénètre dans la nef d’une ancienne chapelle. C’est là que l’on découvre Expenting, une installation de Pipilotti Rist.

Non content d’avoir protégé l’entrée, l’artiste a obturé toutes les ouvertures : aux fenêtres basses pendent des tentures dont les teintes varient suivant l’éclairage ; aux fenêtres hautes, ce sont de grands patchworks, constitués de divers morceaux de tissus bariolés, des assemblages hétéroclites faits de bric et de broc, des étoffes prises ça et là, rapidement cousues sans faire attention aux jointures. Mais leur vivacité colorée évoque des vitraux d’un autre genre, protecteurs et narrant une histoire plus intime que biblique.

Dans cette atmosphère calfeutrée et accueillante résonne une voix féminine chantonnant une complainte incompréhensible, pas tout à fait envoûtante, mais qui nous berce lorsqu’on chemine vers l’ancien chœur de la chapelle où se tient une sorte de piste de dance de fortune, faite de palettes de bois recouvertes d’une plaque de plexiglas. Un peu de musique, une scène, et des spots lumineux qui tournoient dans l’espace : une parodie de fête que l’on aurait désertée ?

Depuis le chœur apparaît dans la partie supérieure de la chapelle une haute structure blanche, énigmatique et lointaine. Cette sensation est d’autant plus forte que pour la voir dans son ensemble, il faut ressortir de l’installation, retraverser dans l’autre sens le rideau et en ouvrir un autre, un étage plus haut, pour découvrir, au centre de la mezzanine, une spirale aérienne constituée d’un voile blanc de dentelle, semblable à un voile de mariée. Sur cette résille délicate défilent des projections : des photographies de femmes, nues, les bras ouverts en croix, des animaux, des objets,…, et toutes sont dévorées depuis leur centre par un feu qui les consume entièrement.

 

Pipilotti Rist semble démontrer ici l’importance – si ce n’est l’influence – du lieu pour une installation. En effet, si Expecting a été conçue pour d’autres espaces, le contexte de cette chapelle lui donne une résonnance particulière. Et l’on en vient à se demander non pas qu’est-ce qu’on attend mais qui l’on attend.

Elodie Voillot.

Exposition Pipilotti Rist au Centraalmuseum à Utrecht, du 14 juillet au 26 août 2012.

http://centraalmuseum.nl/en/visit/exhibitions/pipilotti-rist/

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Art of the Day – Rodin, La Terre et la Lune

Auguste Rodin, La Terre et la Lune, 1899, marbre, H : 125,5 cm ;    L : 78 cm ; P : 58 cm, Paris, musée Rodin

Sur un socle composé de dizaines de tasseaux de bois liés ensemble trône un important bloc de marbre. Il semble avoir été posé là, pas au hasard mais presque, tout juste sorti d’une carrière.

De cette masse portant les stigmates d’un travail à peine commencé, d’une scarification à coups de burin et de ciseau, s’extraient deux petites figures humaines aux formes contournées. Il faut un peu de temps pour voir, bien voir l’étreinte qui les unit. Les bouches s’embrassent et les bras s’enlacent, ramenant dans ce mouvement d’union la figure féminine qui semble vouloir s’en échapper. Lire la suite

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Art of the day / Des avanlanches de mousse – Michel Blazy au Collège des Bernardins

Au Collège des Bernardins, sur la pierre mordorée des larges murs médiévaux, Michel Blazy a installé une pépinière de mousse, un jardin vertical composé d’échafaudages sur lesquels des pans de nuages sortent de jardinières. Lire la suite

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Art of the Day / Souvenir d’Art Basel – Rudolf Stingel

Rudolf Stingel, Untitled (Paula), 2005

Avec son air distant et quelque peu désabusé, Paula semble nous dédaigner. La cigarette à la main, nonchalamment accoudée, elle est assez loin de nous.

Rudolf Stingel livre ici un portrait de sa galeriste Paula Cooper troublant par son imperméabilité et son réalisme – il travaille à partir d’une photographie. Le très grand format de l’œuvre bouscule les codes du portrait et, de même que sa monochromie, lui donne une force décorative. Lire la suite

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Rosascape / This is not a book

Katinka Bock, Blaue Stunde Raum, 2012.

Le livre est, pour beaucoup d’artistes, une récréation. Dans l’espace compris entre les deux couvertures, c’est un monde de possibilités très différentes de celles des médiums traditionnels qui s’offre à eux. Un espace à composer, recomposer, distordre ou déconstruire. Lire la suite

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Intense proximité – La Triennale au Palais de Tokyo

120 artistes

1200 oeuvre

22000 m2

La Triennale du Palais de Tokyo a des chiffres qui en jette – il y a de quoi voir pour la réouverture de l’immense masse de béton ancrée en bord de Seine dans le calme 16ème arrondissement (mais ne serait-on pas à Berlin?). Dans ce dédale piranésien, le promeneur aux 12000 pas déambulera de salles immenses, parfois ouvertes sur le ciel, en pièces exiguës sombres et humides comme des grottes, d’escaliers monumentaux de paquebot aux passages étriqués barbouillés de poésies urbaines où l’on s’étonne presque que ça ne sente pas la pisse. C’est impressionnant et l’expérience de ces espaces vaut à elle seule le détour. Lire la suite

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